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Interview du Directeur National de l’Aménagement du Territoire

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Depuis quelques mois, la Direction Nationale de l’Aménagement du Territoire est dirigée par un nouveau Directeur, M. Abdoulaye SANOGO, Docteur en Administration Économique et Sociale spécialisé en Management des Projets et des Organisations.

Lors d’une interview accordée à l’ORTM 1 le 1er Août 2024, il a passé en revue les concepts et les enjeux de l’Aménagement du Territoire, les missions de sa structure ainsi que les difficultés qu’elle rencontre et enfin les perspectives.

ORTM 1 : Quand on parle d’Aménagement du Territoire, de quoi parle-t-on en français facile ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Je vous remercie de m’avoir invité, de m’avoir donné l’opportunité de parler de l’aménagement du territoire. Quand on parle de l’aménagement du territoire, en réalité c’est de disposer des éléments sur un espace avec ordre donc ces éléments peuvent être des équipements, des infrastructures, … et aussi de veiller à une répartition adéquate de la population sur cet espace en tenant compte bien sûr des contraintes et des potentialités de l’espace en question.

 

ORTM 1 : Quand vous parlez de répartition de la population par exemple, est-ce que cela dépend de l’État ou des structures de l’État  ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Quand on dit répartition de la population, ce n’est pas une déportation mais en réalité c’est de veiller à ce qu’elle soit fixée sur place et cela est une action qui relève de l’État en mettant en place des infrastructures d’intérêt collectif par exemple une école, un centre de santé… des infrastructures (transport, électricité, …) qui peuvent générer des ressources. Ce sont là des éléments qui permettent de fixer la population sur place.

 

ORTM 1 : Quels sont les enjeux globaux de l’Aménagement du Territoire, pour quelle finalité en fait ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : La finalité de l’aménagement du territoire c’est améliorer le cadre de vie de la population, donner un cadre idéal de vie à une population c’est permettre à cette population d’avoir accès sur place à tout ce qui est besoins essentiels tels que la santé, l’éducation, l’emploi, l’électricité et autres, ce sont ces éléments qui permettent à un citoyen de se sentir chez lui, à l’aise et vivre comme il le souhaite. Ce ne sont pas des mesures imposées mais des mesures qui viennent des aspirations de la population.

 

ORTM 1 : A l’échelle de l’UEMOA comment ça se passe car on a l’impression que chacun aménage son Territoire, alors quels sont les enjeux à l’échelle communautaire ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Le principe de l’Aménagement c’est la souveraineté parce que parler de Territoire c’est parler de souveraineté, chaque État a sa souveraineté sur son Territoire mais vous conviendrez avec moi que nous sommes dans un espace où nous partageons des ressources ensemble et aussi nous avons des préoccupations communes qui sont entre autres la gestion et la valorisation des ressources naturelles comme les cours d’eau et les fleuves, la facilitation de la libre circulation des personnes et des biens, la facilitation de l’accès et la connexion à nos marchés régionaux, la réalisation des infrastructures routières, ferroviaires, électriques,… parce que tous les territoires n’ont pas les mêmes potentialités.

 

ORTM 1 : Vous étiez donc dans une rencontre nationale de suivi de ce projet sous régional, où est ce qu’on en est globalement ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Ce projet a été validé en 2020 et est en cours de mise en œuvre dans les 8 pays de l’UEMOA, on l’appelle Schéma de Développement de l’Espace Régional (SDER). Il est initié pour faire de notre espace, un espace intégré qui a une économie moderne et attractive où la libre circulation des personnes et des biens est garantie, un espace où les efforts sont mutualisés pour faire face aux défis énormes en matière d’aménagement du territoire. Quand vous prenez nos territoires, vous allez vous rendre compte qu’il y’a une disparité entre les territoires de l’espace communautaires, il y’a un bloc qui est en avance par rapport à un autre dans un certain domaine, comment faire en sorte que nous ayons un développement équilibré car si un bloc part sans l’autre ça attire la population de l’autre bloc pour aller là où il y’a l’emploi, les services. C’est pourquoi aller ensemble est de l’intérêt de nous tous.

 

ORTM 1 : A l’échelle communautaire, est-ce que vous vous êtes fixés une date butoir ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Oui à l’échelle communautaire c’est 2040 – 2041 qui est visé comme horizon pour pouvoir mettre en œuvre beaucoup de projet sous régionaux intégrateurs qui vont permettre à la population de cet espace d’améliorer leur condition de vie, d’accéder à des emplois et aussi de créer de la richesse.

 

ORTM 1 : Vous êtes Directeur National de l’Aménagement du Territoire, quelles sont les missions et les vocations de cette Direction ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : La Direction Nationale de l’Aménagement du Territoire a été créée en 2004 par une ordonnance. C’est une nouvelle Direction quand on regarde d’autres qui sont là depuis un certain nombre d’années, ce qui fait qu’elle n’est pas très bien connue alors qu’elle joue un rôle très important en matière de développement. Elle est chargée d’élaborer les éléments de la Politique Nationale d’Aménagement du Territoire, d’élaborer et de mettre en œuvre le Schéma National d’Aménagement du Territoire (SNAT), d’harmoniser l’élaboration et la mise en œuvre des autres schémas aux niveaux régional et local, de définir avec les autres acteurs de développement les grands pôles de développement économiques du Mali, de mettre en place un Système d’Information Géographique sur l’aménagement du territoire, ce sont là entre autres les missions de la DNAT.

 

ORTM 1 : Vous parlez de Politique Nationale d’Aménagement du Territoire, que dit globalement cette Politique concernant notre pays ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Cette politique est transversale ça veut dire qu’elle prend en compte tous les secteurs et est multi-échelles. Elle a été adoptée en 2016, comme le contexte de l’aménagement évolue avec le contact socio-économique, cette politique a décidé à un moment d’orienter le pays vers une nouvelle vision parce qu’en 2016 il y’avait des questions d’intégrité territoriale. La politique a alors décidé que notre État se développerait de façon unitaire et que l’Aménagement du territoire soit une prérogative exclusive de l’État qui décide de ce qu’il va faire de son territoire et des orientations qu’il va lui donner. La politique dit aussi d’aller vers une économie inclusive et moderne, d’aller vers un développement équilibré de nos territoires et que du nord au sud, de l’est à l’ouest tous ces territoires soient bien dotés en termes d’infrastructures, d’équipements et autres pour permettre à leurs populations de vivre dans des conditions décentes.

 

ORTM 1 : Est-ce que la Politique Nationale d’Aménagement du Territoire définit concrètement ce qu’il faut et pour quel territoire ?

Dr Abdoulaye SANOGO : La politique est un outil d’orientation global, c’est un outil politique. Tout ce qui est orientation en détail, les actions qu’il faut faire, ça c’est dans un autre outil qu’on appelle le Schéma National d’Aménagement du Territoire.

 

ORTM 1 : D’accord, le schéma parlons-en !

Dr. Abdoulaye SANOGO : Le Schéma National d’Aménagement du Territoire est un outil très précieux, un outil de référence, un outil d’orientation en matière de développement socio-économique et culturel d’un pays, c’est aussi un outil de prospective parce qu’il parle du futur, il fait le bilan territorial tout ce que nous avons comme potentialités, comme contraintes. Le schéma pose aussi les grands enjeux en matière d’Aménagement du territoire, il va également parler des options d’aménagement du territoire qui s’offrent à nous si nous voulons aller vers un pays développé et équilibré, il va fixer des orientations en disant voilà des options de développement mais voilà aussi les directions à suivre et cela par secteur d’activités. Le Mali n’avait jamais eu un Schéma National d’Aménagement du Territoire, c’est une première.

 

ORTM 1 : Depuis quand, le Mali dispose-t-il d’un Schéma National d’Aménagement du Territoire ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Depuis 2022, c’est très récent. Nous ne sommes pas les seuls, même dans la sous-région certains n’en disposent pas jusqu’à preuve du contraire donc nous sommes en avance sur beaucoup de pays concernant l’élaboration d’un Schéma National d’Aménagement du Territoire.

 

ORTM 1 : Dites-nous, comment il est élaboré et comment il est mis en œuvre, que va-t-il changer réellement ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Le Schéma National d’Aménagement du Territoire obéit à un processus participatif et inclusif. Nous avons mené une série de rencontres, de concertations avec l’ensemble des acteurs Étatiques et les acteurs non Étatiques, il s’agit de la société civile, le secteur privé et aussi les partenaires de notre pays. C’est un processus qui a duré quelques mois pour ne pas dire 2 à 3 ans, il y’a eu des ateliers de préparation, des ateliers de lancement pour partager la méthodologie, les approches et ils ont regroupé plus de 3000 acteurs sur le territoire national. Il y’a eu des ateliers au niveau local, qui ont réunis les communes par cercle, il y’a eu aussi des ateliers au niveau des régions qui ont réunis les acteurs régionaux, il y’a aussi eu des ateliers au niveau national, tout cela pour dégager une vision claire pour ensemble connaître notre territoire parce que nous ne pouvons pas aller vers un développement si nous ne savons pas ce que nous avons comme potentialités, ce qui nous empêche d’aller de l’avant. Il nous permet aussi de décrire des scénarios c’est-à-dire un futur possible en disant par exemple si nous suivons la tendance actuelle comment notre pays sera dans 20 ans, il dira aussi comment on sera dans 20 ans si les choses n’évoluent pas comme on le souhaite et là c’est un scénario catastrophe. Donc il nous permet de choisir ce que nous voulons être dans 20 ans en dégageant des stratégies pour ne pas tomber dans le scénario catastrophe.

 

ORTM 1 : Mais on dirait que vous détenez quelque part une boule de cristal pour  nous dire ce qui va arriver !

Dr. Abdoulaye SANOGO : Ce n’est de la magie comme certains le disent, c’est partant des réalités parce que le Schéma National fait le bilan pas sur une année mais sur un certain nombre d’années. On va faire le bilan sur les 10, 15, 20 dernières années dans tous les secteurs.

 

ORTM 1 : Mais est-ce que vous produisez ainsi des outils d’aide à la décision pour les autorités ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Le Schéma est lui-même un outil d’aide à la prise de décision. De ce Schéma d’autres outils doivent être extrait par exemple les rapports sur les profils territoriaux,  normalement chaque année nous devons produire un rapport sur le profil territorial du Mali en faisant ressortir les tendances et en attirant l’attention sur les priorités. En réalité c’est pourquoi le SIG est très important parce qu’il va alerter les autorités sur l’évolution de certains phénomènes dans certains secteurs par exemple on peut attirer l’attention de l’État en disant attention dans le domaine de l’Éducation, le besoin en terme d’infrastructures scolaires est très pressant dans telle région si les dispositions ne sont pas prises d’ici 5 ans voilà le nombre d’enfants qui vont se retrouver sans salle de classe et on sera face à des problèmes d’enseignants dans certaines localités. C’est pourquoi, l’aménagement il est aussi politique parce que nous pouvons attirer l’attention des autorités mais nous ne pouvons pas décider, ce sont les autorités qui décident en disant cette année, nous allons prioriser la réalisation des infrastructures dans telle région mais dans une autre région c’est le recrutement des enseignants qui s’impose et dans une autre région c’est peut-être des problèmes d’assainissement et dans une autre localité c’est un problème de développement des infrastructures agricoles donc ce sont des décisions qui sont prises au niveau politique mais nous devons seulement mettre à la disposition des autorités ces instruments d’aide à la prise de décision. Mais nous ne pouvons pas le faire tant que nous ne connaissons pas les réalités territoriales et ces réalités sont identifiées à travers les outils qu’on appelle les Schémas d’Aménagement du Territoire.

 

ORTM 1 : Schéma d’Aménagement du Territoire avec des déclinaisons régionales vous avez dit, expliquez-nous cela ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Le Schéma National d’Aménagement du Territoire, c’est une orientation globale du pays mais on se dit que chaque territoire a ses spécificités, une réponse nationale ne peut pas être la même réponse partout parce que chaque territoire a ses propres besoins et préoccupations, donc une préoccupation nationale ne peut pas forcement être une préoccupation sur mon territoire, dans ma commune. Par exemple, le problème de logement à Bamako n’est pas forcément un problème dans mon village mais de façon globale, le Schéma va dire qu’il y’a un problème de logement mais de façon spécifique il faut savoir quel est le problème réel de chaque territoire. C’est pourquoi chaque territoire doit être doté d’un Schéma, au niveau régional ils vont dire voilà le problème national mais nous avons une préoccupation particulière qui peut être par exemple le développement de l’agriculture, l’accès à l’enseignement supérieur c’est pourquoi certaines régions font la doléance d’avoir des universités chez elles et même si on les créés ces universités doivent être en rapport avec les réalités du territoire ce qui permet d’avoir des produits qui seront employés parce que la demande locale est orientée par les besoins du territoire.

 

ORTM 1 : Chaque territoire, chaque région son schéma dans la théorie, mais est-ce que dans la pratique c’est comme cela ? Avez-vous réussi à élaborer tout cela ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Oui, dans la pratique toutes les 8 anciennes régions disposent de Schéma d’Aménagement du Territoire, les cercles ayant disparus comme collectivités mais il y’a aussi une vingtaine de cercles qui disposaient de Schéma local d’aménagement du territoire et aujourd’hui nous avons une soixantaine de communes qui disposent aussi de Schéma Communale d’Aménagement du Territoire. Quand on voit le bilan, il est maigre par rapport aux réalités territoriales par ce que nous avons aujourd’hui près de 815 communes, à peine 60 ont un schéma ça veut dire que le chemin est encore long pour couvrir tout notre territoire d’outils de planification spatiale. Je rappelle que ce sont des outils de références, tous les documents de planification doivent se référer des outils de planification spatiale parce que tout se déroule sur le territoire qui est le 1er instrument de tous les acteurs que tu sois acteur de l’éducation, de la santé, du monde rural, … Donc l’outil qui organise ce territoire doit être l’outil de référence pour tous les acteurs.

 

ORTM 1 : A quel horizon prévoyez-vous de couvrir l’ensemble du territoire, plus de 800 communes ?

Dr Abdoulaye SANOGO : Nous tablons sur 5 ans, nous avons même un projet qu’on a initié dans ce sens pour pouvoir couvrir tout le territoire parce que ça y va de notre intérêt. On voit qu’il y’a beaucoup de préoccupations qui sont soulevées par-ci par-là c’est parce que ces outils-là n’existent pas, lorsque vous allez dans les milieux ruraux vous allez trouver que les espaces sont convoités et on n’arrive même pas à trancher parce que la vocation de l’espace n’est pas définie on ne sait pas si c’est un espace agricole, pastoral, réservé aux exploitations minières, forestières ou autres donc si cela n’est pas bien défini chaque acteur cherche à l’utiliser selon son intérêt et les intérêts sont souvent opposés.

 

ORTM 1 : Le non-respect des vocations constitue-t-il un vrai problème aujourd’hui au Mali ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Oui effectivement c’est un véritable problème pour non seulement les villes mais aussi pour le milieu rural. Aujourd’hui il y’a beaucoup de localités où vous allez trouver que les éleveurs ont du mal à accéder aux espaces de pâturages parce que tout est occupé par les champs. Une anecdote qui dit que les champs se déplacent, les animaux aussi se déplacent forcément ils vont se rencontrer un jour. En d’autres termes c’est pour dire qu’il n’y a aucun espace réservé pour l’agriculture et aucun espace réservé pour l’élevage donc chacun se déplace en fonction du potentiel qu’il découvre et veut s’approprier l’espace ce qui peut amener des conflits.

 

ORTM 1 : Dans le cadre des villes centres urbains, êtes-vous une discipline complémentaire de l’urbanisme ou des disciplines associées, ça se passe comment ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : L’aménagement du territoire n’est pas une discipline complémentaire à l’urbanisme, l’urbanisme est un volet de l’aménagement du territoire, on ne peut pas réussir l’urbanisme si l’aménagement ne réussit pas. L’urbanisme c’est l’aménagement dans les villes comme son nom l’indique ça concerne le volet urbain mais vous conviendrez avec moi qu’une ville évolue dans un environnement global, cet environnement global est définit par l’aménagement du territoire. Donc l’urbanisme c’est un élément de l’aménagement du territoire donc l’urbanisme ne peut pas se dissocier de l’aménagement du territoire.

 

ORTM 1 : Vous avez dit couvrir le territoire dans un délai de 5 ans, est-ce que les moyens y suivent ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Nous avons sollicité l’appui de l’État pour pouvoir mobiliser les ressources nécessaires et aussi nous sommes en train de solliciter d’autres partenaires du Mali. Les collectivités aussi disposent de budget, normalement c’est une prérogative qui est transférée aux collectivités mais faute de moyens les collectivités ont du mal à se doter de ces outils-là c’est pourquoi l’État s’est donné la vocation de les aider à se doter de ces outils-là parce que ce sont des outils extrêmement couteux parce que le processus prend beaucoup de temps et demande beaucoup de moyens ce qui fait que beaucoup de collectivités n’arrivent pas à se doter de ces outils-là.

 

ORTM 1: En quoi la territorialisation des politiques consiste comme approche ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Les outils d’aménagement du territoire fixent les vocations c’est-à-dire donnent des fonctions à des espaces. Souvent j’ai l’habitude de dire que l’Homme est venu trouver un plan d’aménagement sur place qui est un plan de Dieu, vous allez trouver qu’il y’a des espaces que Dieu a réservé pour les forêts, pour l’eau, pour l’agriculture et nous avons trouvé ce plan-là ici. Mais nous avons dit que nous avons d’autres besoins qui ne sont pas que ce plan qui souvent n’est pas en notre faveur donc on doit le mettre en notre faveur c’est ça qui amène l’aménagement du territoire. Donc l’homme va tenter de façonner le territoire en fonction de ses besoins mais en faisant ça il s’expose aussi à des risques par exemple un plan prévu de façon naturel pour le passage de l’eau quand vous voulez faire une maison là-bas vous mettez ce plan naturel en cause. L’aménagement dit qu’on peut les mettre en cause parce que l’homme est maitre sur le territoire mais en mettant des alternatives, quand on s’installe en sachant que c’est un passage de l’eau si on n’est pas capable de mettre en place des alternatives c’est-à-dire mettre des collecteurs pour faire drainer l’eau vers une autre direction ça veut dire qu’on ne doit pas s’installer sur cet espace-là. Mais il y’a des espaces où l’homme n’a pas les moyens d’avoir des alternatives c’est pourquoi nous disons que ces espaces ne doivent pas être façonnés par exemple les terres agricoles, une fois que vous mettez de l’habitat sur une terre agricole c’est fini, on ne peut plus faire l’agriculture là-bas donc nous disons que la fonction agricole qui a été donnée à cet espace doit être préservée à tout prix parce que si on perd l’espace, on perd un facteur de production et cela entraine la faiblesse de production alimentaire qui peut aussi conduire au chômage parce que la terre étant un facteur de production, elle emploie aussi des populations et si ces populations n’ont plus ce facteur-là elles tombent dans le chômage et sont obligées de se reconvertir pour apprendre d’autres métiers et si c’est à un certain âge on ne peut plus apprendre certains métiers donc elles sont obligées de vivre de petits boulots. C’est pourquoi on dit que si l’aménagement ne réussis pas, il aggrave aussi la pauvreté parce qu’il va arracher des facteurs de production à certains, il va aussi bloquer les fonctionnalités de certains espaces donc le potentiel qu’on tirait de ces espaces seront perdus.

 

ORTM 1 : Quelles sont les difficultés aujourd’hui auxquelles vous êtes confrontées ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : L’aménagement du territoire est confronté à une difficulté de respect de ces vocations, il y’a une grande partie du territoire où ces vocations ne sont pas fixées parce que pour que la vocation soit fixée il faut que la localité dispose d’un outil de planification spatiale et on l’a dit tout à l’heure qu’il n’y a pas assez d’outils, donc ça veut dire que même nos vocations ne sont pas encore fixées. Nous avons des difficultés en termes de ressources financières mais aussi des difficultés souvent de méconnaissance de l’aménagement du territoire parce que quand on ne connait pas on va penser que l’aménagement du territoire c’est pour nous imposer alors qu’on le dit dans la définition que l’aménagement du territoire est volontaire donc ça veut dire que ça ne s’impose pas, c’est à nous d’identifier nos besoins, c’est à nous de dire on veut ça ensemble et voilà les risques si on s’y met et comment atténuer ces risques-là, si on occupe cet espace voilà les avantages et voilà les inconvénients. Cette méconnaissance de l’importance conduit les citoyens ou d’autres acteurs au non-respect de ces vocations. Donc le 1er problème c’est l’application de ces outils. Nous sommes souvent interpelés lors des inondations car les gens disent que l’aménagement ne fait pas son travail parce qu’il n’y a pas suffisamment de caniveaux mais ils oublient qu’ils ont violés la vocation de l’espace parce que l’endroit où ils sont installés n’est pas un site approprié. En violant la vocation, la population s’expose mais elle ne savait pas que c’était dans son intérêt.

 

ORTM 1 : Comment voyez-vous l’avenir ?

Dr. Abdoulaye SANOGO : Nous voyons un avenir promoteur parce qu’un outil promoteur a été adopté par le Gouvernement en conseil des ministres en 2022 et la mise en œuvre de cet outil a démarré, nous sommes en train de mettre en place les comités chargés de piloter la mise en œuvre de cet outil. Au Mali il y’avait un problème de suivi concernant les outils de planification spatiale, nous sommes en train de mettre en place un comité national qui va suivre la mise en œuvre de cet outil. Il y’a le portage du Schéma National d’Aménagement du Territoire, l’aménagement s’adapte aux réalités socio-économiques qui ont beaucoup changés, la Direction Nationale de l’Aménagement du Territoire de 2004 ne doit pas être la même Direction en 2024 c’est pourquoi nous initions de revoir les missions de l’Aménagement du Territoire mais aussi son statut pour pouvoir lui permettre de bien porter le Schéma National d’Aménagement du Territoire. D’ailleurs c’est une recommandation des assises, toutes les concertations qui ont eu lieu l’aménagement du territoire est beaucoup plus interpellé et l’une des recommandations est d’aller vers la mise en œuvre du Schéma National d’Aménagement du Territoire qui va nous permettre d’avoir un développement équilibré et durable mais aussi de ne pas être surpris par l’avenir parce que le développement n’aime pas les surprises car c’est l’anticipation. L’un des outils d’anticipation c’est le Schéma National d’Aménagement du Territoire qui se veut un outil intégrateur qui parle d’un développement global et qui est axé sur la cohésion parce que l’Aménagement du Territoire dit qu’on ne peut pas aller vers un développement s’il n’y a pas une cohésion territoriale car c’est aussi un outil qui va prôner l’attractivité car on doit se positionner dans la sous-région et l’un des meilleurs outils de positionnement d’un territoire c’est le Schéma National d’Aménagement du Territoire.

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